Le traitement de la dépendance aux opioïdes grâce à l’acupuncture

On observe un intérêt grandissant pour les méthodes complémentaires du traitement de la dépendance aux opioïdes, et l'une de celles-ci est l'acupuncture. Trois articles publiés dans les dernières années permettent de mieux comprendre cette approche.

Un article paru dans Frontiers of Medicine revient sur l'historique et expose les connaissances actuelles sur le traitement de la dépendance aux opioïdes par l'acupuncture.

C'est dans les années 1970 qu'on a découvert que l'acupuncture pouvait déclencher la libération de substances opioïdes dans le cerveau. En 1985, un protocole de cinq points d'acupuncture auriculaire était établi par la National Acupuncture Detoxification Association (NADA),qu'on appelle aujourd'hui le protocole NADA ou méthode NADA.

L'article fait notamment état d'études menéesentre 1993 et 2001, qui utilisaient le dispositif d'acupuncture électrique HANS (Han's Acupoint Nerve Stimulator – du nom de son inventeur Dr. Ji-Sheng Han) pour diminuer les symptômes du sevrage.

On y apprend entre autres que les patients évalués avaient tous repris du poids sur une courte période de temps, et que la fréquence de leurs battements cardiaques, habituellement très élevés lors des périodes de sevrage, était diminuée. Les patients recevant un traitement d'acupuncture nécessitaient également moins de buprénorphine ou de méthadone que ceux des groupes-témoins.

Les effets de l'acupuncture sur la prévention des rechutes chez des utilisateurs d'héroïne ont aussi été étudiés. Parmi ces études, on mentionne celle du Neuroscience ResearchInstitute of Peking University, où l'on permettait à des patients sevrés de recevoir un traitement d'acupuncture quotidien gratuitement. Après des périodes de 3, 6, 9 et 12 mois, les taux de rechute étaient respectivement de 50%, 71,4%, 80,4% et 83,9%. « Sachant que la littérature rapporte des taux de rechute de 94% après 6 mois et de 98% après un an chez des utilisateurs d'héroïne ayant complété un sevrage, le taux de succès de 16% après 12 mois est encourageant », écrivent les auteurs de l'article.

Pour lire l'article complet de Frontiers of Medicine « Acupuncture-related techniques for the treatment of opiate addiction: a case of translational medicine », cliquez ici (document PDF)


Une étude publiée par le Journal of Psychiatric and Mental Health Nursing en 2012 s'est penchée sur l'expérience de 15 patients recevant des traitements d'acupuncture selon le protocole NADA.

Les personnes évaluées avaient été traitées pour diverses dépendances dans une clinique externe et démontraient un syndrome prolongé de sevrage. Les 15 patients avaient tous une dépendance à l'alcool et une de celle-ci était en traitement à la méthadone. Six personnes avaient également connu une dépendance aux benzodiazépines.

Les participants recevaient un traitement d'acupuncture deux fois par semaine durant cinq semaines et répondaient ensuite à une série de questions sur leur expérience de l'acupuncture.

La majorité des expériences étaient positives : sentiment de calme et d'harmonie, effet relaxant, diminution du stress et de l'anxiété, etc. Plusieurs participants notaient aussi une amélioration de leur état de santé physique. Diminution des nausées et des mauxde tête, diminution du rythme cardiaque et amélioration de l'appétit étaient au nombre des observations des patients. Six des 15 répondants mentionnaient une diminution de leur envie de consommer de l'alcool, de la nicotine ou des benzodiazépines.

Les auteurs concluent que devant la quasi-absence d'expériences négatives concernant la méthode NADA et compte tenu du fait que la méthode ait aidé les participants à tolérer leur syndrome prolongé de sevrage, celle-ci pourrait faire partie d'une combinaison de soins pour traiter la dépendance, incluant une approche pharmacologique et comportementale.

Pour lire l'étude « Patients' experience of auricular acupuncture during protracted withdrawal » en entier : (document PDF)


La National Acupuncture Detoxification Association a de son côté procédé à une revue de la littérature sur la méthode NADA, en 2013.

On peut y lire que si le protocole NADA a d'abord été élaboré dans une perspective de traitement des dépendances, il est aujourd'hui utilisé comme complément thérapeutique dans différents domaines,notamment en santé comportementale et dans les traitements contre le cancer. Selon la section américaine de la NADA, 25 000 personnes seraient aujourd'hui formées dans le monde pour utiliser cette méthode, et elle serait accessible dans plus de 40 pays.

L'auteur écrit, différentes sources à l'appui, que la pertinence de l'acupuncture dans le traitement des dépendances est bien établie. Les études publiées dans des revues évaluées par des pairs soutiennent l'utilisation du protocole NADA, en méthode d'appoint, pour le traitement de la dépendance à l'héroïne, l'alcool, la cocaïne et la nicotine.

Deux études récentes mentionnent que les traitements conventionnels combinés à la méthode NADA sont plus efficaces que lorsqu'employés seuls. Une étude de 2005 a de plus démontré la valeur du protocole dans un cadre de réduction des méfaits.

Voici quelques particularités du modèle NADA selon cet article :

  • Combiné avec d'autres interventions

Celles-ci peuvent être des suivis psychosociaux ou médicaux, du soutien par les pairs ou une approche de type « 12 étapes ».

  • Sans barrière

La méthode NADA peut servir de « porte d'entrée » pour d'autres services, permettant ainsi au patient de connaître une expérience positive et significative avant de chercher à entreprendre d'autres démarches.

  • Des traitements réguliers

Ils sont accessibles sans rendez-vous, idéalement sur une base quotidienne durant les premières phases du traitement.

  • Des analyses toxicologiques

Dans le contexte d'un traitement de la dépendance, des analyses toxicologiques fréquentes chez le patient sont effectuées régulièrement afin de mesurer ses progrès.

Pour consulter l'article « Evidence for the NADA Ear Acupuncture Protocol »: (document PDF)